Paradoxe


Jean-François Hamel

Revenances de l'histoire. Répétition, narrativité, modernité


2006
240 p.
ISBN : 9782707319593
19.80 €


Au-delà de l'analyse du récit appelée naguère narratologie, cet essai vise à mettre en lumière l'historicité des pratiques narratives en regard des modes de transmission de la mémoire culturelle. Pour cela, il propose d'interroger la résurgence des représentations cycliques du devenir depuis le XIXe siècle, dont on trouve des occurrences chez Hugo et Michelet, Baudelaire et Blanqui, Marx et Nietzsche, ou encore, au siècle dernier, chez Pierre Klossowski et Claude Simon. Pourquoi la modernité, qu'une vulgate historienne dit structurée par le temps cumulatif et linéaire du progrès, redécouvre-t-elle l'éternel retour des êtres et des événements ?

Cet art du récit fondé sur la répétition est une réplique à la mutation des formes de l'expérience du temps amorcée au déclin des Lumières. En réponse au régime moderne d'historicité que Walter Benjamin et Hannah Arendt évoquaient dans les termes d'une crise de l'expérience et d'une rupture de la tradition, les poétiques de la répétition élaborent une singulière politique du deuil selon laquelle le passé qui revient ne réconcilie pas le présent avec l'autrefois, mais fait différer le présent d'avec lui-même. Or cette résistance mélancolique, qui multiplie fantômes, spectres et revenants, témoigne exemplairement de l'impact du régime moderne d'historicité sur les arts du récit depuis deux siècles.
J.-F.H.

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ISBN
PDF : 9782707327932
ePub : 9782707327925

Prix : 13.99 €

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Sylvie Servoise, Page, octobre 2006

Le livre de Jean-François Hamel devrait passionner tous ceux qui s'intéressent aux rapports qu"entretient l’art du récit moderne avec l’Histoire, et plus précisément avec ce que François Hartog nomme le régime d’historicité, c’est-à-dire la façon dont une société envisage son rapport au temps et conçoit l’articulation entre passé, présent et futur. Prenant à contre pied l’idée répandue selon laquelle la modernité serait ce moment de l’histoire de l’humanité marqué par l’idée de progrès et par une conception linéaire, orientée et cumulative du temps et de l’Histoire, l’auteur de Revenances de l’Histoire révèle la résurgence, au plein cœur du XIXe siècle, d’une pensée de la répétition qui propose une toute autre vision de l’Histoire, marquée par la cyclicité et l’éternel retour des êtres et des événements. D’après Hamel, certaines œuvres philosophiques comme La Reprise, de Kierkegaard, Le Dix-huit Brumaire de Louis-Napoléon Bonaparte de Marx ou encore le Gai savoir de Nietzsche, ainsi que certaines œuvres littéraires (Le Baphomet de Pierre Klossowski, Les Géorgiques de Claude Simon…), élaborent de véritables poétiques de la répétition, permettant ainsi à une narrativité ancienne et que l’on croyait révolue, de refaire surface : c’est bien là un phénomène de « revenance », par lequel « une configuration du temps se manifeste après une longue période de latence ». Cette résurgence des poétiques de la répétition traduirait moins la nostalgie des auteurs pour un temps mythique, qu’elle ne serait le signe d’une « inquiétude mélancolique » qui traverserait le régime moderne d’historicité et qui correspondrait à la douloureuse conscience d’une fracture définitive entre la tradition narrative et l’expérience moderne de l’Histoire, entendue comme expérience d’une « temporalité faite d’hétérogénéités et de disjonctions ». Les poétiques de la répétition répondraient alors à cette inquiétude par la promotion d’ « une mémoire discontinuiste », qui, tout en restant fidèle à la mémoire défaillante de la modernité pour laquelle le passé est déraciné du présent, ouvrirait la voie à une « mémoire juste », « c’est-à-dire une mémoire qui sait à la fois le passé et sa différence irréductible d’avec le présent, qui reconnaît à la fois ce qui reste en elle de l’autrefois et ce qui résiste à son appropriation dans le maintenant ». À l’heure où il est tant exigé de la mémoire et de ses devoirs, cette définition n’est sans doute pas inutile…

Lire le texte de Sébastien Rongier sur remue.net, automne 2006
 
Lire l'étude de Raphaëlle Guidée, "L'Eternel retour de la modernité", Acta Fabula, mars-avril 2007 (volume 8, numéro 2).



 

 




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