Paradoxe


Peter Szendy

Écoute, une histoire de nos oreilles

Précédé de Ascoltando par Jean-Luc Nancy


2001
Collection Paradoxe , 176 pages
ISBN : 9782707317315
18.00 €


« L’écoute est peut-être l’activité la plus discrète qui soit. C’est à peine une activité : une passivité, dit-on, une manière d’être affecté qui semble vouée à passer inaperçue. Quelqu’un qui écoute, ça ne s’entend pas.
J’ai pourtant rêvé d’une archéologie de nos écoutes musicales : une histoire de nos oreilles de mélomanes, de maniaques de mélodies en tout genre.
J’ai voulu savoir d’où elles me venaient, ces oreilles que je porte et que je prête. Quel était leur âge ? Que devais-je, que pouvais-je faire avec elles ? De qui les tenais-je, à qui en étais-je redevable ?
J’ai donc traqué tous les indices possibles.
Il y a une criminologie de l’écoute (des auditeurs se retrouvent au tribunal, accusés ou plaignants). Il y a des écritures de l’écoute (certaines oreilles laissent des traces durables de leur passage). Il y a des instruments d’écoute (des prothèses enregistreuses, des machines à entendre). Enfin, il y a une polémologie de l’écoute, avec ses guerres, ses stratégies organisées ; bref, tout un champ de bataille où nos oreilles, plastiquement, se conforment à des lois et gardent, tel Don Juan face au Commandeur, l’empreinte de l’écoute de l’autre.
Et puis, il y a toi. Toi à qui mes écoutes sont adressées. Toi qui parfois, c’est si rare, m’écoutes écouter. »
Peter Szendy

‑‑‑‑‑ Table des matières ‑‑‑‑‑

« Ascoltando », par Jean-Luc Nancy

« J’écoute » (prélude et adresse)

I. Droits d’auteur, droits d’auditeur (journal de nos aïeux)
Plagiat et devoir de vérité – 1757 : la musique et les notes (de bas de page) -1834 : un grand changement dans nos mœurs – 1853 : un auditeur au tribunal – 1841 : notre portrait en caricature

II. Écrire ses écoutes : arrangement, traduction, critique
Depuis qu’il y a des œuvres... – Fonctions de l’arrangement – Liszt et les traducteurs – L’original en souffrance – L’arrangement à l’œuvre (Liszt, deuxième version) – Schumann critique – Déclin de l’arrangement (pourquoi la musique est-elle si difficile à comprendre ?).

III. Nos instruments d’écoute devant la loi (second journal)
Le premier procès de la musique mécanisée (Verdi sur des planchettes) – La musique en braille – Le phonographe au tribunal – Droits de reproduction et de radiodiffusion – Stravinsky, Schoenberg et les pirates – L’arrêt Furtwängler et les droits voisins – Protéger un son (Harley Davidson dans le paysage sonore) – Du droit de citation en musique (John Oswald, l’auditeur).

IV. Écouter écouter : la facture de l’oreille moderne
Types d’écoute (le diagnostic d’Adorno) – « Écoutant, je te suis » (Don Giovanni) – Polémologie de l’écoute (Berlioz et l’art de la claque) – Ludwig van (1) : l’attention – Ludwig van (2) : la surdité – Schoenberg : « tout entendre ».

Épilogue : l’écoute plastique
Ludwig van (3) : un dialogue avec Beethoven – Ludwig van (4) : la « seconde pratique » des marque-plages – Ludwig van (5) : les prothèses de l’authenticité – Écouter écouter : sommation d’écoute(s)

ISBN
PDF : 9782707327673
ePub : 9782707327666

Prix : 12.99 €

En savoir plus

N. J. (Le Temps, 10 février 2001)

Peter Szendy, des tympans pour écrire l’écoute
Aussi difficile à définir dans l’instant qu’à théoriser dans une perspective historique, l’écoute musicale suscite des interprétations très diverses.
 
« (…) En traquant l’arrangement jusque dans ses manifestations contemporaines, le musicologue déchiffre l’évolution des rapports entre l’auditeur et l’œuvre, recomposant un dialogue dans lequel l’arrangeur joue un rôle “ actif ” et “ critique ”.
Un dialogue que l’auteur instaure également entre son discours analytique et la personne qui partage sa vie, témoin d’une pratique quotidienne de l’écoute musicale. Rédigé à la seconde personne, Écoute… postule la présence d’une auditrice à laquelle l’auteur s’adresse au premier chef. Par cette mise en abyme, Peter Szendy parvient à animer de manière vivante une matière relativement touffue et érudite en lui donnant le ton de la confession, tout en attirant l’attention du lecteur sur les similitudes entre la lecture et l’écoute. Pour Szendy, l’arrangement est à considérer à la manière d’une “ traduction ”, offrant une meilleure “ lisibilité ” de l’œuvre musicale.
Ainsi des réductions pour piano de symphonies permettant, bien avant l’invention du phonographe, à tout un chacun de décrypter l’œuvre de Beethoven à la maison. Ainsi également des “ corrections ” apportées par Rimski-Korsakov aux orchestrations de Moussorgski pour satisfaire le goût du jour. Dans toutes ses traces, la pratique de l’arrangement révèle, au fil des siècles, un souci de clarté aussi bien qu’une volonté de faire entendre les choses selon un mode défini par l’environnement culturel du temps.
Ce faisant, Peter Szendy dessine en filigrane une évolution de l’écoute dans laquelle l’auditeur, de simple réceptacle à sons, prend une part de plus en plus active dans son rapport à l’œuvre (“ Nous autres, auditeurs, nous sommes devenus des arrangeurs ”). Un parcours culminant avec les manipulations des samplers, décomposant l’écoute en fragments pour la reconstituer selon un mode choisi par son seul auditeur, devenu roi.

 




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